Enveloppés de la nuée
amoureuse du Père
« Jésus fut transfiguré devant eux. Une nuée les couvrit de son ombre ».
Lucile rentrait du travail en marchant vite. Il faisait froid. Une dame âgée, vêtue très pauvrement, venait au-devant d’elle, avec un petit chien bien couvert, lui, d’un paletot. En la croisant, Lucie fut envahie de compassion pour cette dame qui, dans son dénuement prenait si bien soin de son chien. Au même moment, autour d’elle tout devint comme lumineux, embrasé de vie. Cela ne dura qu’un instant. Elle n’était guère pratiquante mais elle sut que c’était le Seigneur.
Aline, une autre amie venait d’apprendre la mort de son père. Traversant le jardin, elle vit tout à coup la pelouse plus colorée que nature. Le moindre brin d’herbe était comme un chant d’amour au Créateur.
Nous ne voyons que derrière le voile de notre humanité raisonnable. Ce que nous croyons être la réalité n’en est que l’apparence. À la transfiguration, les apôtres ont contemplé Jésus tel qu’il était en vérité, comme ce jardin soudain animé d’un mouvement d’amour ou comme le cœur de Lucie inopinément soulevé par une vague de compassion.
En méditant cet évangile, que je considérais jusque là comme un moment miraculeux, cet épisode m’est apparu comme au contraire la révélation de la réalité que seule la foi peut me garantir. Depuis, j’essaie de regarder au-delà, dans la certitude que la nuée amoureuse du Père qui couvrit les apôtres m’enveloppe sans cesse, quoique je fasse, et peut-être et surtout quand je ne suis pas celle que je voudrais être.
Odile van Deth